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Roi nu roi mort d’André Laude – La table rase 1983

O mère voici que je viens m’asseoir en silence

au pied de tes os noircis

Je me tais je te contemple seulement

il y a si longtemps déjà que tu es partie

je n’étais alors qu’herbe folle

Sur une photo précieusement serrée

entre les lettres des bien-aimées

qui s’attardèrent un jour ou deux près de ma flamme avant de reprendre la route des fumées

Sur une photo jaunie par le passage des saisons

je ris contre ta bouche merveilleuse étincelante

je ris dans tes cheveux de matin premier

Aujourd’hui cette nuit les poings enfoncés dans le ventre je reviens à la source

O mère près de tes os rares nettoyés par la vents et les neiges

Doucement je pose ma tête d’éternelle enfance

sur tes genoux qui ont goût de pomme de pin

et je pleure

Avec toi tout à l’heure quand les étoiles commenceront

à diminuer au-dessus de la rumeur

quand l’aube dévoilera les dépouilles chaudes encore des suicidés

avec toi ô ma mère aux secrets je parlerai

de l’ancien temps

du temps de l’horrible métier de vivre

Source : poème proposé par André Cuzon