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Centrafrique : silence, on tue et on viole !
La Centrafrique, ce pays pauvre de l’Afrique Centrale, coincé entre le Soudan, le Tchad, le Cameroun, le Congo et l’Ouganda, avait défrayé la chronique fin 2012 lorsque cette nation instable était au bord d’une guerre civile généralisée. Chasse gardée de la Françafrique, le pays avait connu déjà plusieurs tragédies et coups d’état. Riche en pétrole et en uranium (qui était exploité à l’époque principalement par Areva), la Centrafrique n’a jamais pu jouer un rôle très important sur la scène internationale du fait de son enclavement et de son instabilité.
Opération Sangaris : un succès ?
Début 2012, une coalition de groupes armés, venus du Nord du pays et essentiellement composés de musulmans Centrafricains, Soudanais et Tchadiens, ont pris le pouvoir en chassant le despote François Bozizé. Michel Djotodia, premier président musulman du pays et président du parti de les Union des Forces Démocratiques pour le Rassemblement (UFDR). Les musulmans représentent alors entre 10 et 15% du pays (majoritaire au Nord-Est du pays). Ce rassemblement de groupes armés, appelé Seleka, impose alors une véritable terreur sur l’ensemble du pays. Les chrétiens sont les premières victimes : viols, meurtres, enlèvements… Les églises sont pillées, les champs dévastés, l’économie à l’arrêt. La Seleka impose un véritable hold-up sur les exploitations minières (or notamment), enrichissant au passage les seigneurs de guerre. La minorité musulmane elle est épargnée. Les Peuls, éleveurs musulmans, n’hésitent plus à faire paitre leurs troupeaux sur les champs des agriculteurs. Si ces derniers osent manifester, ils sont tués.
Face à ces exactions, des groupes d’auto-défense appelés Anti-Balaka se forment. Contrôlés en parti par l’ancien président Bozizé, ceux-ci s’en prennent non seulement aux Séléka, mais également aux communautés musulmanes. Le pays s’enfonce alors dans une spirale de violence interminable. En décembre 2012, les anti-balaka contrôlent une partie Ouest du pays.
La France décide alors d’intervenir le 5 décembre 2012, officiellement pour mettre fin à ces violences. L’opération Sangaris, très médiatisée, permet de chasser Michel Djotodia et de mettre un gouvernement de transition, sans réel pouvoir ou autorité sur le pays. Les groupes armés (Séléka, Anti-Balaka, Peuls) continuent à contrôler de vastes pans de territoire, sans être inquiétés. Même dans la capitale Bangui, les anciens tortionnaires Séléka continuent de contrôler des bases et à terroriser les populations avoisinantes. L’ONU y déploie une force de maintien de la paix, la Minusca, sans réel efficacité. Certaines unités sont même accusées de complaisance à l’égard des Séléka.
Chaque jour : tueries, viols et enlèvement en toute impunité
Si l’affaire des viols des soldats français de la force Sangaris sur des enfants a fait grand bruit, un peu partout dans le pays, les populations vivent toujours dans la peur. Des groupes armés commettent toujours impunément leurs méfaits. Les Séléka et les Peuls terrorisent les agriculteurs et ce, sans faire réagir la Minusca, pourtant présente sur les lieux. Ainsi, à Kaga Bangoro, une ville du Centre-Nord du pays, des individus armés ont tué 8 personnes, dont un bébé de 10 mois. Ils sont allés de village en village sans être inquiétés. Aucune poursuite n’a été effectuée. Les Anti-Balaka quant à eux s’adonnent à du racket et enlève des musulmanes pour les transformer en esclaves sexuelles.
L’armée Centrafricaine n’existe plus que sur le papier, la gendarmerie ne dispose plus que de moyens très limités. Les forces internationales occupent la Centrafrique mais ne semble pas prendre au sérieux la souffrance de la population Centrafricaine qui vit un véritable cauchemar depuis plus de 3 ans : de nombreux enfants ne peuvent toujours pas aller à l’école, car des bandes armées empêchent les instituteurs d’accéder aux établissements.
Silence, on tue donc. Ce pays très lointain ne semble pas vraiment émouvoir les autorités des pouvoirs occidentaux. L’impunité perdurera encore des mois, voire des années, avant que la population Centrafricaine ne puisse bénéficier d’une vie à peu près normale…