Nuit debout contre les dealers ou l’aveu d’impuissance des forces régaliennes

Sevran_Beaudottes_CiteUne fois de plus, des habitants de la cité Paul Eluard ont passé la nuit dehors en espérant faire fuir les dealers qui squattent le pied des immeubles. Excédés par les squats, les bruits et les désagréments, ces pères et mères de famille souhaitent par leur présence la nuit faire déguerpir ceux qui profitent des accrocs aux drogues douces et dures.

Cela n’est pas sans risque, puisque des voitures ont été vandalisées. Des représailles psychologiques ont été également entreprises, avec de la musique à fond jusque tard dans la nuit pour empêcher les enfants de dormir.

Alors que cette cité, comme tant d’autres dans l’hexagone, était connue pour son trafique de stupéfiants, les forces de police et encore moins la justice n’ont réussi à faire cesser ces activités lucratives. Les rares arrestations conduisent souvent à des sanctions légères, ce qui conduit les policiers à réduire leurs interventions.

Cet épisode montre à quel point les forces régaliennes sont impuissantes face à un fléau qui pourrit tout un quartier. Ce sentiment d’abandon ou d’impuissance n’est pas sans conséquence puisque :

  • Plusieurs personnalités politiques espèrent dépénaliser les stupéfiants pour briser les trafiques, au risque d’impacter significativement la santé de ceux qui en consomment
  • Plusieurs chercheurs et intellectuels estiment que ces trafiques apportent une certaine paix sociale : avec l’argent récolté, les jeunes et les caïds arrivent à « contrôler » les cités, qui n’explosent pas malgré les tensions sociales. Cela a quand même des désagréments puisqu’un filtrage est effectué et n’importe qui ne peut pas pénétrer dans la zone de deal
  • Les prisons étant surchargées, les arrestations ne conduisent souvent pas à l’incarcération. De ce fait, les forces de police sont plus réticentes à « prendre des risques » pour un résultat limité
  • Avec cet abandon, des associations cultuelles et d’autres organisations ont pris le dessus et tentent de ramener le calme et la sérénité, souvent avec l’appui des forces politiques locales. Si cela fonctionne sur le court terme, l’apparent non contrôle de ces associations et l’augmentation de leur influence provoquent des inquiétudes tant chez les riverains que chez certains sociologues et politologues.

Un échec qui risque bien, une fois de plus, de faire le jeu des abstentionnistes, nationalistes ou souverainistes, dont le poids ne cesse d’augmenter d’élection en élection. Il n’y a hélas aucune solution miracle, puisque même chez nos voisins, ce fléau semble s’accentuer d’année en année.

Bien entendu, on aurait tort de considérer l’ensemble de ces quartiers comme des zones de non droit : le tissu associatif existe, des familles tentent de s’en sortir, des activités sortent de terre et de nombreux talents ont été découverts tant sur le milieu sportif que culturel ou social. Hélas, le trafique de drogue et ce sentiment d’abandon poussent certains jeunes à basculer du mauvais côté, au grand désespoir de leurs parents.

 

Publié le 24 avril 2016, dans Actualité, et tagué , , , , . Bookmarquez ce permalien. Poster un commentaire.

Laisser un commentaire