Usine d’amiante à Aulnay-sous-Bois : le combat continue avec Ban Asbestos !
COMMENTAIRE SUR L’ARRET DU 27 NOVEMBRE 2024 DE LA COUR D’APPEL DE PARIS CONDAMNANT LE CMMP D’AULNAY SOUS BOIS
Cet arrêt en appel porte sur le différent de droit privé entre le CMMP et les agences immobilières auxquelles a été vendu le terrain de l’ancienne usine de broyage d’amiante et qui ont fait l’objet de moultes procédures.
Le CMMP croyait se débarrasser du fardeau aux agences immobilières, peu soucieuses elles-mêmes de la question de la pollution de cette ancienne friche industrielle, qui pensaient faire là une bonne affaire avec leur projet de construction de 11 pavillons sur un terrain amianté.
Le Maire Gérard Ségura décide de faire réaliser le chantier de désamiantage-démolition par la Commune, comptant se retourner ensuite en justice contre le CMMP pour le remboursement des frais.
Aussi, cet arrêt ne concerne pas les conséquences judiciaires de la catastrophe sanitaire que le CMMP a déclenchée qui, lui, a eu lieu au pénal à la suite de la plainte en 1998 de la famille LEONARD/VOIDE accompagnée d’une vingtaine d’autres victimes de l’amiante, qui s’est soldé en 2015 par un non-lieu, les responsables juridiques de l’époque étaient tous décédés. Il n’a pu être malheureusement prouvé que les dirigeants actuels n’aient eu une responsabilité dans cette catastrophe sanitaire sachant qu’ils ont été
prévenus par la Mairie et la Préfecture dès 1996 que des curieux s’intéressaient au dossier du CMMP ainsi elles leur donnaient le temps de « nettoyer » leurs archives avant la perquisition de la police à leur siège à Paris. L’impunité au titre pénal est donc totale et la responsabilité de l’entreprise en tant que personne
morale, qui n’a pas respecté la règlementation sur l’amiante édictée par l’arrêté préfectoral sur l’autorisation d’ouverture de 1938, n’a pas malheureusement pu être prise en compte pour des raisons juridiques.
Revenons sur cet arrêt en appel de 2024. Les associations sont intervenues tout au long de la procédure pour informer les juges des conséquences du délit d’abandon du site dangereux et les informer de leur intervention active et constante pour garantir, conformément à la loi, la sécurité du chantier de
désamiantage-dépollution autant pour les travailleurs que pour les riverains et les enfants des écoles mitoyennes.
Lors de l’audience en 2015 de cette procédure en appel, les victimes étaient présentes au tribunal et maître François Lafforgue a dû insister fortement pour pouvoir plaider. La présidente était contrariée par leur
présence et nous étions très pessimistes quant au jugement final. Avec le recul, nous pouvons considérer qu’étant donné la complexité des procédures délibérément déclenchées par le CMMP (aux tribunaux de Paris, Cergy Pontoise, Montreuil) avec également une plainte pour « abus de pouvoir »contre l’inspecteur du travail d’Aulnay, la cour a dû poser de nombreuses questions pour démêler l’écheveau, le problème des
victimes n’étant pas pour les juges directement à l’ordre du jour ou, du moins, pas leur préoccupation première.
Néanmoins contrairement à notre première impression, la lecture des 32 pages démontre le sérieux du
jugement en appel du 27 Novembre 2024 conforme à la loi et à la réglementation sur l’environnement étayé par 24 documents d’études de pollution et d’expertise dans lesquels les associations ont largement contribué et exercé leur pression et reconnait le bienfondé d’un chantier sous confinement total. De plus, le tribunal a reconnu le rôle des associations et de la mobilisation citoyenne concernant le déroulement du chantier.
L’origine de la procédure provient d’une plainte du CMMP pour clause abusive contre l’arrêté préfectoral du 5 Août 2004 l’enjoignant de dépolluer et de démolir les bâtiments. A souligner que le Préfet, alerté par Nicole et Gérard Voide dès 1995, a mis 9 ans pour faire tout simplement respecter la loi. Le CMMP se retourne ainsi contre les agences immobilières, réalisant que, sous la pression et l’intervention en justice des associations
dès 2006 bientôt rejointes par la Commune d’Aulnay, le coût du chantier sera plus important que le simple coût d’aspirateur qu’il envisageait de réaliser avec la complaisance de l’entreprise COTEBA.
Les associations sont intervenues dans plusieurs expertises tenant tête notamment aux experts Karlesking et Biseau qui nous accusaient de vouloir un chantier de luxe. Dans la procédure judiciaire, elles alertent
également (étant partie prenante car associées aux rendez-vous de chantier) sur le danger suite à la
découverte du zircon radioactif et du dépotoir délibéré et demandent, à leur propre initiative, l’intervention de la CRIIRAD.
Ce jugement en appel de 2024 fait suite au premier jugement du 22 Octobre 2015 du Tribunal d’Instance de Paris qui déboutait, d’une part, toutes les parties dans leurs prétentions sauf les associations qui, elles, sont reconnues comme intérêt à agir mais avec un dédommagement de 1 euro symbolique par association et
1000 euros d’aide au titre des frais d’avocats. Ce jugement reconnaissait que la présence d’amiante est consécutive au broyage industriel mais n’obligeait pas à un chantier sous confinement réclamé à l’époque par les seules associations.
QUELQUES PERLES DURANT CES 30 ANNEES DE BATAILLE :
1997 : l’inspection du travail d’Aulnay précise à Gérard Voide au téléphone « on a bien un dossier CMMP mais la chemise est vide, ce n’est pas normal » !
1999 : les experts de Qualiconsult réussissent l’exploit de ne pas trouver d’amiante dans l’usine de broyage d’amiante sauf sur la toiture en fibrociment alors qu’ils pataugent dans la poussière d’amiante qui recouvre
leurs chaussures comme les nôtres lorsque Gérard a visité les lieux avec Alain Bobbio. Henri Pézerat et Gérard Voide ont dénoncé ce fait au Ministère de la Santé, lettre restée sans réponse.
Le CMMP déclare que l’amiante résiduel ne remplirait même pas un seau d’enfant.
2007 : Les experts Karlesking et Biseau déclarent : « la poussière n’est pas un matériau…. la poussière n’est pas de l’amiante friable…. l’amiante est en quantité infinitésimale» alors que Véritas trouve en 2006 le chiffre de 5 900 000 fibres d’amiante par cm2 sur les charpentes du site.
L’entreprise COTEBA, à la télévision : « on ne peut pas faire un chantier recouvert car le travail en hauteur est trop dangereux » !
2004 : l’étude de pollution de l’expert CDB est qualifiée par le Préfet d’alarmiste. Pourtant 66 prélèvements sur 103 contiennent de l’amiante et ce dans tous les bâtiments et non seulement dans le seul atelier
d’amiante.
QUELQUES REPERES :
Dès 1995, à la déclaration du mésothéliome de Pierre Léonard, le Maire, le cadastre municipal, le Préfet sont prévenus. Gérard et Nicole Voide adhèrent à BAN ASBESTOS FRANCE et prennent contact avec leurs responsables (Henri Pézerat, Annie Thébaud-Mony, Patrick Herman) qui nous aident et nous encouragent dans notre enquête personnelle de 5 ans.
En 1996, Nicole et Gérard adhérent à ANDEVA (Ban Asbestos France a participé à sa création).
En 1998, nous remettons un dossier d’enquête accablant à maître Jean-Paul TEISSONNIERE qui dépose une
plainte contre X et une enquête préliminaire est ouverte au parquet de Bobigny où Gérard fournira le dossier au lieutenant de police et le Ministre de la Santé Bernard Kouchner est alerté.
Au printemps 2000, Annie Thébaud-Mony et Gérard Voide participent à la création d’ Addeva 93 (ce qui provoque un article de presse dans la revue de santé « Viva » et « Le Parisien»). C’est le début de la
médiatisation.
A l’automne 2000, Nicole et Gérard distribuent 4 000 tracts autour de l’usine (sous le sigle d’Addeva 93)
invitant à une réunion publique dans le quartier du Vieux Pays. C’est lors de cette première réunion publique que se sont révélés les premiers malades et à la suite de laquelle un collectif des riverains et victimes du
CMMP s’est créé et animé par Gérard Voide, rejoint par les parents d’élèves des écoles du Bourg et par Aulnay Environnement, formant ainsi une coordination de 6 associations (Collectif des riverains et victimes du CMMP, BAN ASBESTOS FRANCE, ADDEVA 93, associations de parents d’élèves FCPE et LIPE, AULNAY
ENVIRONNEMENT).
A SOULIGNER :
- Jean-Pierre Poteau et Robert Halifax d’Aulnay Environnement ont également joué un grand rôle de part leur connaissance de la ville et leur popularité.
- Le rôle de Maître François Lafforgue dès la première réunion publique, la première permanence d’aide aux victimes et la gestion de plus de 100 dossiers d’indemnisation auprès du FIVA (fonds
d’indemnisation des victimes de l’amiante), sa présence active auprès des tribunaux pour faute
inexcusable de l’employeur. Il aura également géré de bout en bout toutes les procédures contre le CMMP
- Le rôle exemplaire du mouvement citoyen au travers de 12 réunions publiques, 9 motions adoptées à l’unanimité (2002, 2003, 2004, 2006, 2007, 2008 et 2009) enjoignant Préfet, Maire, DDASS, STIIIC, OPPBTP, inspection du travail, médecine du travail, ministres, CRAMIF, BRGM, ADEM, DDT, INVS,
CIRE …. à agir
- Dans cette affaire, rien ne nous aura été épargné, depuis le mensonge du Maire et du Préfet en 1995 aux réticences puis obstructions au cadastre de la ville et au service environnemental de la préfecture, refus de nous communiquer les documents, etc… Tout s’est passé comme s’il y avait une
complaisance, voire une compromission, en faveur de l’industriel
CE QU’IL RESTE A FAIRE :
- S’assurer auprès des autorités de l’enregistrement officiel des restrictions d’usage du terrain toujours pollué en profondeur sous la dalle et qui pourrait être oubliées lors de futurs travaux
- S’assurer du paiement par le CMMP des 13 millions d’euros avec intérêts, CMMP qui va surement tout faire pour y échapper (cassation ? et autres ?). Les dirigeants, prévenus dès 1995, ont eu 30 ans pour
provisionner comptablement les futurs frais judiciaires des travaux et des plaintes. L’entreprise est prospère et travaille notamment dans les produits cosmétiques.
- Nous étions en désaccord avec le Maire Gérard SEGURA dans sa substitution au CMMP pour réaliser le chantier de désamiantage/démolition. Le Préfet était acculé dans sa compromission avec le CMMP et nous étions sur le point de porter l’affaire en justice pour connivence de l’Etat avec l’industriel et non application de la loi, procès que nous aurions gagné puisque tous les arguments figurant dans l’arrêt du 27 novembre 2024 étaient les mêmes. Ainsi, les contribuables aulnaysiens n’auraient pas été les banquiers du CMMP.
- Ban Asbestos est toujours disponible pour traiter des demandes de victimes qui se feraient connaître. Le 9 janvier 2025
Source : Nicole et Gérard Voide
Publié le 13 janvier 2025, dans Associations, Santé, et tagué Amiante, Aulnay-sous-Bois, Ban Asbestos, CMMP. Bookmarquez ce permalien. 1 Commentaire.

M.Oussouf Siby remercie le Maire pour le rétablissement des conseils de quartier alors qu’ils avaient été abandonnés depuis 2 ans . Enfin le rétablissement…on aura tout vu, quelle belle opposition , M.Siby bientôt sur la liste du Maire. Qui en 2026?